Préservons l’histoire de la Rafle du Vel d’Hiv et de l’été 1942 contre l’oubli et les
tentatives de falsification

Après quatre jours passés dans l’enceinte du Vel d’hiv, ils sont transférés au camp de Pithiviers dans le Loiret. Gitla, la mère de Clara, fait parvenir une autre lettre dans laquelle elle annonce la déportation de son mari Chaïm dit Louis, par le convoi 13 du 31 juillet 1942.

Clara et sa mère sont désignées pour le convoi 16 du 7 août 1942. Henri et Jean, restés seuls, sont transférés le 22 août à Drancy d’où ils sont déportés par le convoi 26, le 31 août 1942.

Tous les membres de la famille Garnek ont été assassinés à Auschwitz.

La lettre de Clara a été remise au Mémorial de la Shoah en 1998 par sa cousine, Germaine.

Je ne sais si on pourra supporter encore longtemps ceci. Maman n’en peut plus.

C’est encore plus abrutissant que toutes les femmes racontent des choses qui ne tiennent pas debout et au lieu de se remonter elles se descendent et celles qui ont un peu de courage, elles le perdent petit à petit.

Je ne peux pas vous en écrire plus long et nous espérons vous revoir bientôt.

Jeannot pleure tout le temps parce qu’il veut retourner à la maison.

il se présente à l’entrée et, arguant de la grossesse de Flora, obtient sa libération…

Maurice est transféré quatre jours plus tard au camp de Pithiviers mais il n’y reste que peu de temps.

Le 31 juillet 1942, il est déporté par le convoi 13. Il est assassiné à Auschwitz.

Flora donne naissance à Michel après avoir trouvé refuge en banlieue parisienne dans une maison qui accueille les mères célibataires.

C’est lui qui a confié les lettres de son père au Mémorial de la Shoah.

Jamais on n’aurait pu imaginer pareil chose. Parqués là pire que des bêtes, sans aucun soin d’hygiène
2 cabinets toujours occupés pour des milliers de personnes. Il faut attendre des heures son tour. Pour l’’eau c’est pareil. Si l’on ne nous sort pas d’ici le plus tôt, les gens seront tous malades.

Pourtant on s’occupe de nous. Hier on nous a distribué du pain deux fois, du bouillon cube, même du macaroni bien cuit. Un bout de chocolat et un petit gâteau. On nous gâte. On ne sait pas ce qu’on fera de nous, combien de temps resterons-nous ici. Pour le moment, nous sommes en train de se raconter l’un à l’autre ses misères.

Je suis avec un monsieur qui me connait bien et te connait aussi. Il est de Wloclavek.
Sa femme est restée à la maison parce que malade et couchée. Il te prie si tu peux aller la voir
et l’encourager un peu. Il craint que quand elle ira un peu mieux on la prendra aussi. Si tu la vois dis lui qu’en cas qu’elle sera prise il faut qu’elle prenne une couverture chaude avec un oreiller c’est très utile. Aussi qu’elle prenne la petite montre et bracelet ainsi que les fils (en hébreu) qu’elle sait. Une gamelle et pull over. Si tu ne peux aller la voir écris lui un mot de suite en (en hébreu). Voici son adresse : Renkiel 28 rue de Belleville (20ème).

Quand à moi, j’ai pris avec moi assez de choses. Beaucoup des gens n’en ont pas autant. Il est maintenant près de 8 heures du matin. Ce que le temps est long. J’ai lu un peu mais je n’ai pas beaucoup de patience pour lire. On parle ici que la Turquie est rentrée en guerre. Les uns disent que c’est contre la Russie, les autres contre l’Allemagne. Que la France a déclaré la guerre à l’Angleterre où le contraire. Si ce n’est pas l’Amérique. Tu vois que nous savons tout sauf la vérité. J’ai le courage bien que le moral est déprimé à la vue de tant de procédés inhumains. Encore une fois si tu es à la maison, je suis heureux pour toi. Prends soin de toi, moi je ferai de même avec l’espoir de nous revoir un jour. J’espère faire sortir cette lettre bientôt. Bien des choses à tous les voisins. Tu peux leur donner la lettre à lire. Je pense à tout et leur remercie
de leur sympathie.

Ton mari Maurice

Henri et sa mère Antonina sont envoyés au Vel d’hiv où elle écrit une lettre déchirante et pleine de lucidité qu’elle adresse à la concierge de son immeuble, le 17 juillet. Après quatre jours, ils sont transférés dans le Loiret, au camp de Beaune-la-Rolande. Antonina, séparée de son fils, est déportée par le convoi 15 qui part pour Auschwitz le 5 août 1942.

Henri est ramené à Drancy le 19 août. Son père multiplie les démarches pour le faire sortir, invoquant le fait qu’il travaille pour une entreprise qui fournit l’armée allemande. Libéré le 15 septembre 1942, Henri est caché jusqu’à la fin de la guerre.

Rentrée de déportation, Antonina retrouve son mari et son fils. Ils quittent la France pour s’installer en Argentine en 1951.

Chère Madame pardon, vous serez bien aimable de prendre quelques affaires à Mademoiselle Hayum car elle veut me garder l’enfant. Gardez bien mon appartement, sortez la machine svp. Comme remerciement, prenez quelque chose de chez moi. Peut-être on se verra un jour. Me Pechtner.

Tâchez de voir mon mari et de l’aider ! Allez chez le concierge le soir, je vous embrasse bien fort.